Une très belle fresque musicale et familiale du Québec des années 60-80.
Un film doux, tendre, parfois tragique et tellement attachant. L’humour est omniprésent et traité de façon réaliste et intelligente. Même chose pour la trame dramatique. Dans les deux cas, le traitement est sobre et bien fait, de sorte qu’on y croit et qu’on embarque dans l’histoire.
C’est l’histoire de Zac (de l’enfance à l’âge adulte), au sein d’une famille « tricotée serrée » de cinq enfants (tous des garçons). Son apprentissage de la vie et sa découverte et acceptation de lui-même (et de l’homosexualité). Et à travers tout ça, les liens très particuliers qu’ils a avec ses frères mais surtout ses parents: son père/idole, sa mère/ange-gardien.
La trame musicale, bien représentative de cette période, appuie de façon très appropriée -et même puissante- les événements (Rolling Stones, Bowie, etc.). Comme un catalyseur d’émotions. J’ai trouvé très rafraîchissant et émouvant l’amour du père pour l’oeuvre de Charles Aznavour (que je partage, soit dit en passant!). C’est d’ailleurs matière à « running gag », à un moment, ce qui ajoute au plaisir de la chose! La reconstitution (costumes, décor, contexte) est très bien réussie. On s’y méprend!
À mon avis, ce qui est le plus touchant dans ce film est l’amour et la tendresse, qui sont presque palpables: ceux que l’on ressent entre les parents, ceux qu’ils ont pour leurs enfants et réciproquement et ce, envers et malgré tout. Ces liens du sang qui sont parfois plus forts que la simple raison, qui vont au-delà de la compréhension et même, parfois, de l’acceptation. Ou en tous cas qui peuvent exister même sans cette dernière (et heureusement).
Le casting est extraordinaire. Chaque comédien cadre parfaitement avec son personnage. Michel Côté (le père), Danielle Proulx (la mère), Marc-André Grondin (Zac) sont extraordinaires. Avec une mention spéciale pour le comédien qui joue le tout jeune Zac (le fils du réalisateur). Un grand petit comédien, déjà!
Un récit très humain. Sur les valeurs fondamentales, celles de la société et leur évolution à travers les individus et les âges. Plein de sincérité et de vérité. Vraiment -et très simplement- touchant.
Réal.: Jean-Marc Vallée, Québec, 2005.
Catégorie : Un bon film, un!
Le Role de sa vie
Aaaaah! Un autre très bon film issu d’un Festival 2004 à Montréal, le (défunt?) FFM celui-là!!! C’est d’ailleurs la seule chose un peu plate des Festivals, s’il en est une, que de voir prendre l’affiche un bon film plusieurs mois après l’avoir vu en grande primeur, et donc de se surprendre à se dire qu’on aurait presqu’envie de ne pas l’avoir déjà vu! Vous me suivez? Visiblement, je me cherche des raisons pour chialer, là, moi! N’empêche, je me suis mentalement passé la remarque en entendant qu’il prenait l’affiche… Enfin!
Un duo du d’enfer (au sens très positif du terme) pour un film du tonnerre (au sens cynique et grinçant du terme). Agnès Jaoui incarne Elizabeth, une grande comédienne pédante, prétentieuse, archi-égocentrique et égoïste. Karin Viard est Claire, une jeune journaliste qui devient son assistante, bras droit et souffre-douleur. Entre elles se créera une très spéciale relation d’amour-haine, de jalousie-sympathie, de duo-trio relationnel et quelque peu incestueux, disons. Si en théorie ça semble un peu compliqué, en pratique ça ne l’est pas du tout, je vous l’assure et c’est délicieux à regarder!!!
Ce sont deux grandes comédiennes que j’adore. Et elles sont, ensemble et si c’est possible, encore plus fantastiques. C’est peut-être ce que l’on décrit souvent comme de se faire valoir mutuellement, de se renvoyer la balle!? On en vient à oublier complètement leur deux statuts propres et réels et on se prend à leur jeu. On est rempli de sympathie pour l’une, tout en détestant ouvertement l’autre! Et on se retrouve, nous aussi, en équilibre sur la très fine ligne entre la réalité, la fiction, la vie publique et la vie privée. Habile.
Les situations et les dialogues sont intelligents, cyniques et souvent drôles. Une belle satyre du statut de star, des mythes qui l’entourent, de l’amitié et des relations entre femmes. Et un joli constat sur l’amour, propre et réciproque. Et sur le besoin d’amour, qui lui, est définitivement et plus que jamais, universel. Et malgré ce que certaines personnes se plaisent à se faire croire… à elles-mêmes!
Je pense que je vais donc faire fi du FFM et répondre à la petite plainte de mon intro… en retournant le voir, tout simplement, ce film! Ben quoi!?!? C’est rare que ça me prend et là, j’en ai envie. Bon!
Réal. : François Favrat, France, 2004.
The Assassination of Richard Nixon
Autre film tout droit sorti du dernier FCMM.
Sean Penn est un de mes acteurs fétiches. Une fois de plus, avec ce film, il confirme et même, en rajoute! Il y campe ici Samuel Bicke, un homme déçu, un vendeur désabusé, troublé, perturbé, malheureux qui perdra tout (famille, emploi, logement) et qui blâmera son patron, la société, le système tout entier -à travers son ultime responsable-: le Président, Richard Nixon.
Penn est fascinant de justesse, d’intensité, de complexité aussi. Quel grand acteur… Il nous fait subtilement glisser, avec son personnage, sur la dangeureuse pente de la paranoïa et de la folie, gagnant d’abord notre sympathie puis nous le faisant regretter lentemement par la suite. On est triste pour lui, déçu, puis navré. La trame dramatique est très habilement maintenue par le rythme constant mais lent, par les longs plans d’attente, par l’attitude tellement changeante et instable de Bicke. On suit tranquillement mais sûrement sa dégringolade, par des retours en arrière (et un bon montage). L’atmosphère lourde et un peu glauque, qui nous maintient dans un espèce de malaise, est incroyable.
Naomi Watts (qui joue son ex-femme) est elle aussi toujours aussi bonne comédienne. Que de talent réuni dans ce seul couple! (dans le film, je veux dire). Elle, pour sa part, essaie de refaire sa vie avec leurs enfants tout en ménageant son ex-mari, qui, on le devine, continue encore et toujours de lui faire des promesses… et de ne pas les tenir.
On apprend également plusieurs choses sur cette période, aux plans économique, social, politique. La reconstitution est bien faite et intéressante. Les scènes où Bicke se fait enseigner les rudiments de la vente (à coups de bouquin et cassettes de motivation) par son patron et l’employé-vedette de celui-ci sont surréalistes. Et les réactions de Penn, en conséquence.
Même si le film se passe en 1974, déjà, les thèmes du terrorisme et de la guerre sont présents. De même que celui de la démocratie et de la place réelle qu’elle prend ( ou la nature qu’elle revêt?) dans cette société et encore aujourd’hui. On ne peut plus actuel, vraiment!
Réal.: Niels Mueller, É.U., 2004.
Les Choristes
Énoncé de façon concise et simple: un très joli film.
Joli parce qu’il nous raconte une histoire relativement positive et touchante. Et parce qu’il parle de choses pas très «sexy», pas très commerciales mais tellement importantes et universelles: le besoin d’amour (toutes origines confondues), le sentiment d’appartenance, le besoin de reconnaissance, la compassion, la passion, la gentillesse, mais aussi la méchanceté, la suffisance, la frustration, le mal-être. Et ce que tous ces choses peuvent avoir comme répercussions dans la vie d’une personne.
Gérard Jugnot, que j’aime bien comme comédien, m’a semblé encore meilleur dans ce rôle. Il est posé, émouvant, intègre, modeste dans ce très beau rôle de musicien n’ayant pas officiellement réussi (c’est ma version des faits), mais en individu et en professeur ayant on ne peut plus maîtrisé l’art de communiquer ses passions ainsi que ses formidables valeurs. En pensant à son personnage, on se dit que c’est vraiment quelqu’un de bien. Et qu’on aurait aimé l’avoir comme professeur, nous aussi!
Clément Mathieu (Jugnot) est un suppléant arrivant dans un collège pour jeunes enfants ayant des troubles de comportement (et quelques-uns étant abandonnés ou orphelins). Le collège est dirigé par un homme dur et intransigeant, sous le signe de la répression la plus totale («action/réaction», comme il explique lui-même). C’est donc l’histoire de l’arrivée de cet homme, son impact sur les enfants, le collège, de même que les autres enseignants.
Presque tous les enfants sont très bons, crédibles, attachants. Même ceux qui ont des personnages plus difficiles, disons, arrivent à nous communiquer leurs sentiments de toutes sortes et à nous atteindre à travers ceux-ci. Parce que la vie n’est jamais toute blanche ou toute noire, comme on le sait, et que la façon dont évoluent les gens a généralement beaucoup à voir avec leurs environnements familial, social, leur éducation, etc.
La trame musicale est tellement belle, presque lyrique. Quelles voix ont ces enfants, c’est vraiment impressionnant. On ressort du film rempli de toutes ces voix, avec plusieurs images et petits sourires en tête, le coeur un peu serré, mais somme toute léger…
Réal.: Christophe Barratier, France, 2004.
Vera Drake
Un autre film tout droit sorti de la cuvée FCMM 2004, que j’avais manqué à ce moment. Mais que j’avais hâte de voir… avec raison puis-je ajouter maintenant!
C’est le genre de film qui vient vraiment vous chercher… L’histoire d’une femme d’une bonté si entière et si authentique (à faire pleurer, même, dans mon cas!), une mère de famille adorable et une épouse attachante, toujours prête à aider les autres, toujours de bonne humeur, que tout le monde aime (comment faire autrement)?!? Mais à qui toute cette bonté coûtera cher… malheureusement et tellement ironiquement.
Le film aborde le difficile sujet de l’avortement dans l’Angleterre des années 50 (sujet encore d’actualité, d’ailleurs), à travers la vie connue et la vie cachée de cette femme, Vera Drake. Deux réalités, deux pôles d’activités mais une seule protagoniste et un même but: celui d’aider les autres.
Un film tout en émotion, pendant lequel on retient notre souffle à quelques reprises. Par peur de ce qui peut se passer, par tristesse de confirmer, tranquillement, les différents événements. On voudrait tellement que cette femme soit traitée et reconnue à sa juste valeur. On en arrive même à oublier les gestes qu’elle a posés et les conséquences possibles (et graves) de ceux-ci.
Imelda Staunton est tout simplement grandiose dans ce rôle. Grandiose de simplicité, de nuances, de dignité, de douceur et de calme. Phil Davis, qui campe son mari, est également formidable et très convaincant. Comme on aimerait les avoir dans notre famille, ces deux-là… (même si j’adore la mienne -en passant- rien à voir!). La reconstitution de la période est très bonne. Les personnages sont tous intéressants et typés.
Un très beau film, qui met en lumière, du même coup, plusieurs autres dualités sous-jacentes: la douceur du rythme et la dureté des événements, les classes sociales qui se côtoient et leurs réalités propres, l’amour et la désillusion, la vérité et le mensonge, les choix et leurs conséquences. Vraiment touchant.
Réal.: Mike Leigh, Royaume-Uni, 2004.