Je savais le sujet difficile, j’en ai eu pour mon argent! Mais je m’attendais également à de très belles prestations et là aussi, j’ai été bien servie.
C’est l’histoire d’une femme médecin très humaine qui a vécu une perte tragique et un grand deuil, lui-même doublé, comme si ce n’était pas assez, d’une grande impuissance. Qui rencontre sur son chemin une autre femme, victime de violence conjugale, avec son enfant, et qui décide, certainement sans même réfléchir à deux fois au danger bien réel d’outrepasser son mandat, de les aider. Et qui en ressortira encore plus blessée et détruite qu’auparavant. Comme quoi, malheureusement, il est parfois vrai qu’un drame n’arrive pas seul. Ou comme quoi rien, finalement, puisqu’aucune logique ne peut expliquer de tels drames. C’est d’ailleurs une autre grande force de ce film, l’absence de jugement et de morale. Le constat, seul. Et les sentiments écorchés, à fleur de peau. Intenses et purs.
Un film sur la douleur, la grosse douleur lourde et insupportable. Celle qui enlève le goût de continuer et qui ne peut apparemment se surmonter seul… ce qui rend bien évidemment difficle, par conséquent, l’acceptation de l’aide, si nécessaire soit-elle. Cercle vicieux oblige. Mais c’est aussi et surtout un film sur la générosité pure, la gentillesse, le don de soi. Sans oublier la simplicité et la culpabilité. Rempli d’humanité, quoi. Avec toute la force dont elle est capable, mais toutes les faiblesses qu’elle comporte aussi.
Les comédiens sont étouffants de vérité et de crédibilité. Patrick Drolet et la formidable, que dis-je, l’immense comédienne Élise Guilbeault. Je pensais avoir vu sa plus belle prestation avec la «Femme qui boit» (du même réalisateur). Cette fois encore, elle nous jette à terre, littéralement. Je reste marquée et impressionnée par ses regards silencieux mais si complets, si remplis de sens, d’émotions et bien sûr, d’insoutenable douleur. En contrepartie, Patrick Drolet y est doux, sobre, si touchant et attachant. Un beau contraste avec son imposante carrure.
Un film lent, sobre, très contemplatif. Qui parle de religion sans en parler vraiment. Qui parle surtout d’amour, de déchirure et d’aide. Celle que l’on donne, gratuitement, et celle que l’on reçoit, tout aussi gratuitement mais parfois avec force difficulté, malgré nous.
Réal.: Bernard Émond, Québec, 2005.
La Neuvaine
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